Abel PRÉNAT
les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918
Abel PRÉNAT
Abel Prénat est né le 15 juin 1883 à Bastia (Corse). Il est mort (disparu) le 22 mai 1915 à Sedd-ul-Bahr (péninsule de Gallipoli, Turquie). Il avait trente-et-un ans.
Il a quitté le collège Sainte-Marie en 1901. Lors de son recensement (1903), il est étudiant.
Il a effectué son service militaire de novembre 1904 à septembre 1905, au 38e régiment d'infanterie de Saint-Étienne.
De l'automne 1908 jusqu'à 1914, il vit en Tunisie à Gammarth (au nord-est de Tunis, municipalité de La Marsa) puis à la Goulette (port de Tunis). Il s'est marié le 9 novembre 1910, à Versailles, avec Madeleine Bibas (1888-1980).
À la mobilisation, il est incorporé au 4e régiment de Zouaves à Tunis. Il est nommé sergent le 19 octobre 1914, puis adjudant le 19 novembre de la même année.
- Abel Prénat est le frère d'Henri Prénat, lui aussi ancien de Sainte-Marie mort pour la France.
Abel Prénat, à 13 ans, au collège Sainte-Marie
collège Sainte-Marie, classe de 3e, 1896-1897 ; au premier plan, en blanc : Abel Prénat
Abel Prénat, à l'âge de 13 ans
fiche matricule d'Abel Prénat
fiche matricule d'Abel Prénat, né le 15 juin 1883
Abel Prénat
de Saint-Martin-en-Coailleux
adjudant au 2e régiment de marche de zouaves (9e cie)
Abel Prénat fut l’aîné de cette nombreuse et belle génération des fils de notre cher compatriote, François Prénat, aujourd’hui à la Marsa, en Tunisie. Son nom se trouve inscrit sur les registres scolaires, pour la première fois en octobre 1890, et ne disparaît qu’en 1901, après une série d’années, qu’on a bien raison d’appeler la plus brillante du collège. Encore Abel laissait-il après lui ses autres frères auxquels il avait la voie des études et dont les registres de Sainte-Marie gardent le souvenir jusqu’en 1908. Cette fidélité fait de lui plus que de tout autre l’enfant de Notre-Dame-de-Valbenoite.
D’une nature ardente, primesautière, il était de ceux qui saisissent un peu «à la volée» l’enseignement de leurs maîtres. Les vieux classiques auraient pu se plaindre de ne pas voir leurs charmes appréciés comme l’exige l’admiration traditionnelle accordée à Virgile ou à Homère. Mais du moins, grâce à la noblesse et à la délicatesse de ses sentiments, si judicieusement cultivées au foyer de sa famille, son âme était largement ouverte aux inspirations généreuses. Il aimait qu’on lui parlât de zèle, d’ardeur au service de Dieu et de la patrie.
Il comprenait d’instinct la beauté de cette formation morale qui aboutit au sacrifice. Sans doute le sacrifice provoque, même chez les meilleurs, des soubresauts et des répugnances. Parfois le premier mouvement du caractère n’est point en harmonie avec la beauté de l’idéal qu’on propose. Mais combien l’éducateur se trouve récompensé de ses peines lorsqu’il s’aperçoit qu’en dépit des résistances instinctives, l’âme de l’enfant, du jeune homme s’ouvre de plus en plus aux grandes aspirations vers une vertu plus ferme, vers une piété plus solide, vers une énergie plus soutenue…
Abel Prénat était de ceux qui montent à mesure qu’ils grandissent. Tout faisait prévoir qu’il saurait maintenir avec honneur le lourd, mais glorieux fardeau des traditions familiales !
Il était déjà depuis plusieurs années en Tunisie lorsque vint le saisir l’ordre de la mobilisation. Adjudant au 2e régiment de marche de zouaves, il dut comprendre de suite que son rôle serait actif pendant la guerre. Pouvait-il pressentir qu’il serait de si courte durée ?
Bien rapide en effet fut la campagne de notre cher ancien.
On se rappelle le coup de main tenté sur les Dardanelles, dès le mois de novembre 1914. L’entreprise, conçue peut-être avec trop de précipitation, se heurtait à des difficultés vraiment insurmontables, et c’est à triompher de ces obstacles que fut destiné le régiment d’Abel Prénat. Un régiment de zouaves, un régiment de marche peut-il s’effrayer de ce qui est pour d’autres irréalisable ?
Notre adjudant arriva aux Dardanelles le 15 mai 1915. L’arrivée dans cette région si difficile à prendre devait être suivie immédiatement du combat. Impossible de tenir, à moins de marcher en avant.
Le 22, Abel occupait la tranchée avec vingt-deux hommes de sa section, en un point nommé redoute Bouchet, tout près du fameux ravin de Kerwis Déré (1). Voyant que la 2e compagnie de son bataillon qui chargeait à sa gauche allait être encerclée par les Turcs, il fit mettre baïonnette au canon, et avec sa petite troupe, à la tête de ses zouaves, le premier il bondit hors de la tranchée.
Il reçut une première blessure à la cuisse, mais n’on continua pas moins à entraîner ses hommes. Blessé une seconde fois il tomba, et depuis ce moment personne ne l’a revu. Abel et ses vingt-deux hommes ont tous été tués ou blessés ; mais, grâce à son initiative, la compagnie voisine fort en danger a pu échapper au péril.
Quel épisode que ce coup de main, avec cette conclusion : tous tués ou blessés ; mais les autres sont sauvés ! Il est difficile de réaliser d’une façon plus complète le sacrifice du soldat : mourir pour son pays, sur une terre étrangère, en délivrant des compagnons d’armes.
Honneur au brave qui sert d’entraîneur pour cette immolation ! N’est-ce point, dans un cœur chrétien, l’acte de l’amour parfait ? Les hommes ont raison de parler de sa sublimité. Dieu, le Bon Dieu, serait-il moins magnanime que les hommes ?
1 - Il s'agit plutôt de Kérévès Déré (le révin du haricot).
en 1914, Abel Prénat est incorporé au 4e Zouaves, en Tunisie
groupe de zouaves devant une caserne, Tunis
Bizerte (Tunisie), caserne des zouaves
Bizerte (Tunisie), caserne des zouaves (carte envoyée en 1915)
zouaves pendant la guerre de 1914-1918
zouaves du 4e régiment, 1914-1918
zouaves à Noyon, autochrome de Fernand Cuville, 1917
Abel Prénat a débarqué à Sedd-ul-Bahr, dans les Dardanelles
Sedd-ul-Bahr (Turquie), juin 1915
les forces alliées dans la région des Dardanelles, Le Miroir, 16 mai 1915
la flotte alliée vue du fort détruit de Sedd-ul-Bahr
Sedd-ul-Bahr : château et canon
Abel Prénat est mort près du ravin de Kérévès Déré
Abel Prénat est mort (disparu) à proximité du ravin de Kérévès Déré le 22 mai 1915
région du ravin de Kérévès Déré, vue aérienne, juillet 1915 (AFGG)
croquis perspectif pris à partir de Sedd-ul-Bahr
croquis perspectif pris à partir de Sedd-ul-Bahr, extrait
environs de Krithia, péninsule de Gallipoli, février 2015