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école Sainte-Marie à Saint-Chamond
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30 septembre 2018

Édouard DÉCHELETTE

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Édouard DÉCHELETTE

 

 

DÉCHELETTE Édouard, fiche MPLF

 

Édouard Déchelette est né le 4 février 1896 à Roanne (Loire). Il est mort le 21 mai 1915 à Boesinghe (Belgique). Il avait dix-neuf ans.

Il appartenait au 1er régiment de Marche de Zouaves (RMZ) dont certains éléments ont été intégrés à la 45e Division d'Infanterie dès le début de la guerre ; cette formation est appelée 7e RMZ en décembre 1914 (source), d'où cette mention sur la fiche MPLF d'Édouard Déchelette alors que la fiche matricule mentionne le 1er RMZ.

 

fiche matricule d'Édouard Déchelette

 

DÉCHELETTE Édouard, fiche matricule (1)

DÉCHELETTE Édouard, fiche matricule (2)
fiche matricule d'Édouard Déchelette, né le 4 février 1896

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Charles et Édouard Déchelette, de Montagny

Le nom de Déchelette se trouve plus d’une fois répété sur la liste glorieuse de nos morts. C’est ainsi que les deux cousins Charles et Édouard sont tombés à peu d’intervalle l’un de l’autre et nous aimons à les associer dans cette gloire commune, dont il est si difficile de faire un équitable partage. D’ailleurs, il ne s’agit point d’assigner des rangs, mais de livrer aux générations qui restent ou qui viendront encore au foyer de Sainte-Marie, le souvenir des Anciens, nos héroïques défenseurs.

Nous empruntons à une correspondance fraternelle les détails suivants : «Charles, caporal mitrailleur au 37e régiment d’Infanterie, avait été mobilisé dès le premier jour. Demeuré quelque temps à Décize, comme instructeur des nouvelles classes, il avait demandé à être affecté aux mitrailleuses.

Après un court séjour au camp de la Valbonne, il est parti au front où il a trouvé une mort glorieuse au combat de Bischoote, en Belgique. Se portant à l’attaque du village de ce nom, il a été tué d’une balle au front, le 22 décembre, au matin.

Il n’a été l’objet ni de distinctions honorifiques ni de citations. Il a fait humblement son devoir, donnant sa vie pour la France ».

Et oui, il en est tant de valeureux soldats, tombés au poste du devoir, dans l’ombre du fossé, à la lisière du bois, loin du regard des chefs ! Les récompenses qui brillent ne sont point pour eux. Mais sont-ils moins grands parce qu’ils restent méconnus ? Qui donc oserait avoir même cette pensée ?

Le cousin de Charles, Édouard Déchelette, lui aussi a bien mérité de son pays.

Il s’engagea au 7e Zouaves. Quand on se rappelle l’humeur joviale de l’ancien de Sainte-Marie, on ne s’étonnera pas de ce choix. Blessé deux fois, il conserve tout son entrain ; renvoyé au canal de l’Yser, où en huit jours il a l’occasion, peut-être bien devrait-il dire la chance, de charger cinq fois à la baïonnette et de prouver que les plus horribles missions deviennent héroïques, lorsqu’elles sont inspirées par le patriotisme.

Mais le jour vint où l’intrépide soldat du 7e Zouaves ne put charger davantage. Il était tombé au service de son pays.

 

 

 

Édouard Déchelette a passé quelques mois à Alger

avec le 1er régiment de Zouaves, en 1914

 

soldats du 1er Zouaves partant pour le Maroc
Alger, soldats du 1er Zouaves partant pour le Maroc

 

Alger, caserne d'Orléans, 1er Zouaves
Alger, caserne Orélans, 1er Zouaves

 

Coléa, caserne des Zouaves
Coléa, caserne des Zouaves, carte postée en 1918

 

 

Édouard Déchelette est mort à Boesinghe, en Belgique, en 1915

 

le front à Ypres en 1915
le front au nord-est d'Ypres (Belgique) en 1915 (source)

 

Boesinghe sur la carte en 1915 (1)
Boesinghe, Première Guerre mondiale (source)

 

Boesinghe sur la carte en 1915 (2)
Boesinghe, Première Guerre mondiale (source)

 

Boesinghe cpa (1)
Boesinghe, l'église et le cimetière dévastés

 

Boesinghe cpa (2)
bois de Boesinghe, quelques tombes

 

Boesinghe cpa (3)
Boesinghe, cimetière dans le parc du château

 

Boesinghe cpa (4)
Boesinghe, intériur de l'église "après le passage des barbares"

 

 

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29 septembre 2018

Joseph DÉCHELETTE

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

Joseph Déchelette, Livre d'or centenaire
Joseph Déchelette

 

 

Joseph DÉCHELETTE

 

 

DÉCHELETTE Joseph, fiche MPLF

 

 

Joseph Déchelette est né le 8 janvier 1862 à Roanne. Il est mort le 4 octobre 1914 à Vingré (Aisne). Il avait cinquante-deux ans.

Élève à Sainte-Marie, de 1871 à 1879, il est devenu un grand archéologue, spécialiste de la protohistoire française et de l'archéologie celtique européenne. En décembre 1911, il est membre correspondant de l'Académie des Inscriptions et belles-lettres.

En 1914, il demande à inétgrer une unité sur le front et frappé au tout début de la guerre : blessé le 3 octobre par un éclat d'obus, il meurt le lendemain à 12 heures 45. Après avoir été enterré d'qbord dans un petit jardin du hameau de Vingré, il est aujourd'hui inhumé dans la nécropole militaire nationale du Bois-Roger (1) à Ambleny dans l'Aisne, carré F tombe 83.

1 - On trouve les deux noms : Bois-Robert (sur les cartes postales anciennes, par exemple) et Bois-Roger (aujourd'hui).

 

son parcours militaire

En 1881, un an avant le tirage au sort pour le service militaire, il signe son engagement conditionnel pour un an (à l'époque la durée du service était de 4 ans ou de 6 mois à un an selon le tirage au sort) et effectue donc son service militaire de novembre 1881 à novembre 1882, au 38e régiment d'infanterie de Saint-Étienne. Il devient sergent peu avant la fin de l'année.

En 1887, il est nommé sous-lieutenant de réserve ; lieutenant en 1896, au 104e régiment territorial d'infanterie caserné à Roanne. Il est enfin nommé capitaine en 1904, toujours dans l'armée territoriale (1).

1 - L'organisation militaire comportait quatre niveaux : l'armée d'active (hommes de 21 à 23 ans faisant leur service + les militaires professionnels) : l'armée de réserve (24 à 33 ans) ; l'armée territoriale (34 à 39 ans) ; la réserve de l'armée territoriale (40 à 45 ans auxquels on a joint en 1914 ceux de 46 à 49 ans) ; les officiers de l'armée territoriale peuvent, sur leur demande, et s'ils remplissent encore les conditions d'aptitude nécessaires, être maintenus dans le cadre des officiers de ladite armée jusqu'à l'âge de 65 ans pour les officiers supérieurs et de 60 ans pour les autres : ce qui était le cas de Joseph Déchelette.

 

 

fiche matricule de Joseph Déchelette

 

Joseph Déchelette, fiche matricule (1)

Joseph Déchelette, fiche matricule (2)

Joseph Déchelette, fiche matricule (3)
fiche matricule de Joseph Déchelette, né le 6 janvier 1862

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Joseph Déchelette
de Roanne
1862-1914

Dans la phalange des anciens élèves du collège Sainte-Marie morts glorieusement pour la France, au cours de la guerre d’une grandeur épique qui vient de finir par la victoire française, un nom se détache et mérite d’être mis en lumière. C’est le nom de Joseph Déchelette, un savant qui, aux premières heures si tristes de l’invasion, a demandé à sacrifier sa vie et, par un singulier hasard, est tombé en héros à Vingré (Aisne), au voisinage des vastes nécropoles gauloises décrites par lui dès 1911 et dont il évoquait encore le souvenir, à la veille de succomber.

Né à Roanne, le 8 janvier 1862, Joseph Déchelette appartenait à une vieille famille de Montagny (Loire), profondément attachée aux traditions de la religion catholique.

À l’exemple de ses deux frères, Eugène, qui devait plus tard jouer un rôle important dans l’industrie, et Joanny, aujourd’hui évêque d’Évreux, il fut envoyé en 1871 au collège des Maristes, à Saint-Chamond. Il en sortit en 1879 avec le diplôme de bachelier. Ses professeurs et ses camarades le considéraient comme un écolier studieux, d’esprit clair, de volonté tenace ; ils appréciaient sa droiture et sa loyauté. Cependant aucun indice ne permettait de prévoir qu’il serait un jour un des meilleurs historiens de nos origines celtiques et que l’Institut le marquerait du signe de ses élus.

Après coup, il est vrai, ceux qui l’ont connu depuis son enfance et qui ont vécu de sa vie se souviennent que dans la maison bourguignonne de Saint-Didier-en-Brionnais où chaque année se réunissait, lors des vacances, sa famille maternelle, Joseph Déchelette collectionnait avec une naïve curiosité «parce que, disait-il, c’étaient des choses datant du déluge», des ammonites recueillies sur les remblais d’une carrière de pierre calcaires.

Son oncle, Gabriel Bulliot, le célèbre explorateur de la Bibracte celtique, au Mont-Beuvray, fut son véritable initiateur. Joseph prêtait une oreille attentive à ses conversations sur la civilisation gauloise ou sur l’art roman et l’accompagnait quand il entreprenait un pèlerinage archéologique à Varennes, à Anzy ou à Semur-en-Brionnais. Peu à peu s’ébauchait ainsi sa vocation.

 

Gabriel Bulliot et topographes militaires
Gabriel Bulliot (à droite) avec des topographes militaires (source)

 

Avant de s’y livrer entièrement, il dut faire à Roanne un stage de plusieurs années dans l’industrie du tissage de coton qui était celle de son père et de son frère Eugène ; mais déjà il employait ses loisirs à l’étude des arts de la période médiévale et, membre de la Société archéologique de la Diana, à Montbrison, et de la Société Éduenne à Autun, il confiait ses premières monographies aux Bulletins de ces associations régionales et à une revue qui eut son heure de prospérité, le Roannais Illustré, 1889-1890.

Il amassait en mêmes temps d’innombrables matériaux, se constituant une bibliothèque qui, à la suite du legs de ses livres, des manuscrits et des papiers de son parent Chaverondier, l’érudit archiviste du département de la Loire, prit les proportions d’une bibliothèque publique.

Ses lectures alternaient d’ailleurs avec des voyages. Il parcourut l’Espagne, le Portugal, la Palestine, la Syrie, la Grèce, l’Égypte et l’Algérie, afin de voir sur place les vestiges des anciennes civilisations et de s’imprégner de l’antiquité classique. Jusqu’à son départ aux armées, en 1914, tous les ans, il renouvela ses excursions dans les principaux musées de France, de Belgique, d’Autriche-Hongrie, d’Allemagne et d’Angleterre. Ses séjours en Italie, spécialement à Rome, furent de longue durée.

Il avait quitté l’industrie en 1899 et s’était exclusivement consacré à l’archéologie. C’es alors que réfugié dans le bel hôtel qu’il avait acheté à Roanne et où il avait installé sa merveilleuse collection de livres, il eut la patience de recommencer l’étude du grec et du latin, d’apprendre plusieurs langues : l’anglais, l’allemand, l’espagnol, l’italien, le tchèque et le portugais pour mieux s’assimiler les travaux scientifiques de l’étranger.

D’autre part, il fréquentait les congrès archéologiques et nouait des relations avec les principaux savants français : MM. Héron de Villefosse, Salomon Reinach, Camille Jullian, etc.

Cependant son oncle Gabriel Bulliot l’attirait dans son orbite, en faisait son élève et l’associait aux fouilles de Bibracte, une des plus merveilleuses découvertes de notre sol gaulois.

De 1897 à 1901 il lui avait confié le soin de continuer des recherches que Joseph Déchelette n’a jamais abandonnées après la mort de Bulliot en 1902 et dont il a publié les résultats : Recherches du Mont Beuvray, de 1897 à 1901 (Paris, A. Picard, 1904).

Spécialisé dans l’archéologie celtique et gallo-romaine, il ne tarda pas à devenir un des maîtres de cette science. Son autorité s’étendit dans toute l’Europe ; on le consultait ; les revues se disputaient ses articles ; on le mandait, dès qu’une question difficile se présentait, comme en témoigne la mission (octobre 1913) en Carniole qu’il reçut d’une princesse allemande, la grand-duchesse de Mecklembourg-Schwérin.

Il avait dû renoncer à ses études sur le Moyen Âge qui nous avaient valu un livre illustré, édité sous le patronage de la Diana, en collaboration avec Eleuthère Brassart et le chanoine Reure : Les peintures murales du Moyen Âge et de la Renaissance en Forez (1900).

Trois ouvrages consacrèrent définitivement sa renommée : Les vases céramiques ornés de la Gaule romaine (1904, Paris, 3 vol. in-4° avec 1700 dessins, éd. A. Picard) ; le Manuel d’archéologie préhistorique, gauloise et gallo-romaine (Paris, 4 vol. in 8°, édit. A. Picard, 1908-1914) ; la Collection Million. Antiquités préhistoriques et gallo-romaines (Paris, un vol. In 54°, 1913, 48 pl. et 58 fig., édit. A. Picard).

Ces ouvrages reflètent sa robuste intelligence et donnent la clef de sa méthode.

Esprit lumineux, précis, synthétique, fermé aux théories nébuleuses, mais ouvert aux vues d’ensemble : quand il abordait un sujet, Joseph Déchelette s’y préparait toujours par un double travail. Il visitait les vestiges, les monuments ; décrivait les objets, les dessinait, les classait par groupes, les comparait entre eux ; puis lisait tout ce qui avait été écrit sur la matière. Son plan une fois arrêté, il traçait le tableau des chapitres et des paragraphes ; il rédigeait enfin d’un seul trait. Son style était simple et élégant.

Un savant éminent, membre de l’Institut et conservateur du musée d Saint-Germain, Salomon Reinach, avec qui il était lié d’amitié, exerça sur lui une influence prépondérante et contribua à développer son goût des idées générales.

Pour Joseph Déchelette en effet l’archéologie n’était pas une science de pure curiosité, mais un instrument de reconstitution des époques auxquelles appartiennent des reliques s’apparence quelquefois insignifiante, aux yeux du vulgaire.

Que d’aperçus originaux, que de vérités méconnues, que de remarques ingénieuses se retrouvent sous sa plume et quelle clarté inattendue il a fait rayonner autour de la civilisation gauloise !

Ses excursions dans l’oppidum celtique de Stradonitz (Bohème) et la traduction qu’il donna de l’ouvrage en tchèque de L. Pic lui permirent, par exemple, par l’analogie que présente cet oppidum avec celui de Bibracte, de démontrer l’unité de la civilisation des Celtes et la diffusion des mêmes mœurs dans les centres qu’ils avaient créés en Europe.

 

Déchelette, vases ornés

 

Son traité des Vases ornés de la Gaule romaine fut une révélation et causa une profonde surprise.

C’est un inventaire complet des poteries rouges dites sigillées fabriquées dans la Gaule romaine, à l’imitation des poteries d’Arezzo. Joseph Déchelette qui s’était adressé à tous les collectionneurs et avait lui-même entrepris des fouilles, a classé topographiquement et chronologiquement les ateliers céramiques gallo-romains, après avoir relevé 203 noms de potiers (ateliers de Saint-Rémy, de Vichy, de Gannat, de la Graufesenque, de Lezoux, etc…) et après avoir groupé les vases en séries, selon leurs formes, leur décoration ornementale et leurs motifs figurés.

Grâce à ce classement minutieux, la présence de simples tessons au milieu d’une fouille permet de dater les objets découverts. L’ordre a succédé au chaos. L’archéologue possède maintenant un chronomètre sûr ; de même que l’historien, à l’examen de ces parties essentielles du mobilier gallo-romain, peut se rendre compte des préférences artistiques, de la mode chez nos ancêtres des premiers siècles de l’ère chrétienne.

En 1905, sur les conseils de Salomon Reinach, l’éditeur parisien Auguste Picard demanda à Joseph Déchelette un Manuel d’archéologie préhistorique, gauloise et gallo-romaine.

Il accepta cette lourde tâche que seul du reste il pouvait accomplir et y travailla pendant neuf ans.

Son livre est un véritable chef d’œuvre, un parfait exposé de l’état de nos connaissances sur ce cycle qui plonge dans la nuit des temps.

Les trois premiers volumes ont été mis en vente de 1908 à 1912. Joseph Déchelette y a fait revivre notre préhistoire de l’âge de pierre et notre protohistoire de l’âge du bronze (période hallstattienne).

Le quatrième volume, le dernier paru (juin 1914), qui embrasse l’époque de l’âge du fer (époque de la Tène), c’est-à-dire les cinq siècles qui précédèrent la naissance de J.-C., est un tableau largement brossé de la civilisation celtique. Toutes les découvertes relatives à cette civilisation qu’il connaissait mieux que personne sont inventoriées et classées : les habitations des celtes, leurs oppida, leurs sépultures, leur mobilier, leurs armes, leurs bijoux, leur outillage, leur poterie, leurs procédés industriels, leurs entrepôts et les routes suivies par les commerçants. La comparaison de milliers de documents l’amène à confirmer la conclusion qu’il avait déjà formulé à propos de l’Hradischt de Stradonitz et que les archéologues avaient à peine soupçonnée : l’uniformité de la civilisation celtique en Europe.

Entre temps (1913) sous la forme d’un catalogue illustré et raisonné de la célèbre Collection Million à Dijon, collection qui avait trait au second âge de fer en France, Joseph Déchelette publia une œuvre capitale dans laquelle il développe la solution de nombreux problèmes ébauchés dans son Manuel.

 

Joseph Déchelette, portrait

 

Déjà il mettait la dernière main au cinquième volume du Manuel consacré aux monuments romains en Gaule, quand brusquement éclata la guerre.

Joseph Déchelette était un ardent patriote. Capitaine d’infanterie territoriale, affecté aux services intérieurs, il avait le droit, à raison de son âge, de ne pas être envoyé en première ligne dans les troupes d’assaut ; mais cette idée du moindre danger lui était insupportable. Il s’en ouvrit à sa jeune femme - (il avait épousé au mois de mai 1905 Melle Jane Bonnier, fille d’un bibliophile distingué, ami de son frère Eugène) - et celle-ci, qui partageait les travaux de son mari dont elle était le secrétaire intelligent, fut la première, malgré ses angoisses, à l’encourager stoïquement à choisir la voie du sacrifice.

Déchelette obtint un commandement dans un régiment de réserve du Roannais, le 298e, qui s’est couvert de gloire par la prise d’un drapeau allemand.

Il partit pour le front, poussé à la fois par son patriotisme et par la curiosité de voir, lui qui avait écrit l’histoire, comment elle se faisait.

Dans une lettre d’une fière allure adressée le 20 septembre à un autre historien des Gaules, Camille Jullian, et qu’a citée Salomon Reinach (Revue archéologique, 1914), cette préoccupation semble percer :

  • «L’heure, disait-il, n’est plus guère à l’histoire des temps antiques, quand celle de notre patrie s’accroît de jour en jour de pages si glorieuses. Mais le passé est inséparable du présent. Je ne doute pas que cette bataille de la Marne, livrée sur l’emplacement de grandes nécropoles gauloises, ne vous ait donné, comme à moi, une patriotique et réconfortante vision. Épée de la Tène ou fusil modèle 1886, c’est toujours la même lutte de l’âme celte contre la brutale agression des Germains. Les compagnons des guerriers de Somme-Bionne et de la Gorge Meillet (1) ont vu passer nos troupes victorieuses. Heureux les jeunes qui prennent part à ces luttes formidables ! Les pauvres territoriaux comme moi se résignent pour le moment au rôle d’instructeurs. J’ai pu reprendre le commandement de ma compagnie. Nous espérons bin qu’on nous donnera bientôt un rôle plus actif…»

Quelques jours après avoir réalisé son désir, le 3 octobre 1914, à Vingré (Aisne), il tombait mortellement frappé par un éclat d’obus. On le transporta dans une grange du voisinage, à demi ruinée par les projectiles. Il demanda un prêtre, reçut en pleine connaissance les secours de la religion et s’éteignit le lendemain, 4 octobre. Ses hommes pleuraient autour de son cercueil.

Une citation à l’ordre de l’armée, insérée au Journal Officiel, est le plus éloquent des hommages rendus à son héroïsme :

«Déchelette, capitaine de territoriale au 298e régiment d’infanterie, a été tué le 3 octobre, alors qu’il entraînait sa compagnie, sous un feu violent d’artillerie et d’infanterie, et lui avait fait gagner 300 mètres de terrain. Avant de mourir, a demandé au lieutenant-colonel commandant le régiment si l’on avait gardé le terrain conquis, et sur sa réponse affirmative lui a exprimé sa satisfaction en ajoutant qu’il était heureux que sa mort servît la France».

Et maintenant il repose provisoirement dans un petit jardin du hameau de Vingré, au pied d’une stèle de pierre très simple, longtemps fleuri par des mains pieuses.

Sa mort a été un deuil cruel non seulement pour ses proches, mais pour la science.

Chez lui les qualités de l’homme privé rehaussaient celles du savant. Aimable et bon, sans aucune vanité, généreux et serviable, il savait se mettre à la portée des plus humbles. Ses parents et ses amis l’adoraient ; de sa maison il avait fait le plus hospitalier des foyers. Il accueillait d’un sourire, avec une humeur toujours égale ses nombreux visiteurs, et ceux qui l’ont approché n’oublieront jamais le regard si France et à peine teinté d’ironie qui illuminait sa figure. À l’exemple de tous les grands travailleurs qui appliquent à l’utilisation du temps une discipline méthodique, il ne paraissait jamais pressé et ne dédaignait pas les distractions mondaines ou familiales.

Chevalier de la Légion d’honneur, il était membre correspondant de l’Institut depuis 1911 et membre de la plupart des Académies d’Europe.

En 1915, l’Académie française lui a décerné le prix Lambert dont le montant, par un noble geste de sa femme, a été cédé à des œuvres de guerre.

Un comité composé des représentants les plus illustres de l’Institut et de l’Archéologie, sous la présidence de M. Héron de Villefosse et sous la direction du comte Costa ed Beauregard, a eu la touchante pensée de faire graver par le médailleur Henry Nocq une plaquette de bronze, à la glorification de sa mémoire. Au revers, un sabre d’officier français se croise avec une épée gauloise sous une couronne de lauriers d’un beau relief. Une légende accompagne cet emblème, au haut et au bas de la médaille :

Galliæ reliquias illustravit, pro Gallia miles cecidit.

[Il honora les vestiges de la Gaule. Le soldat est mort pour la France]

 

médaille bronze Joseph Déchelette

 

Le nom de Joseph Déchelette ne périra pas.

Il sera inscrit sur le Livre d’or du collège où cet administrateur de l’Antiquité avait puisé ses premières notions classiques.

 

1 - En 1873, furent mises à jour des sépultures gauloises dont une tombe à char sur le territoire de la commune de Somme-Bionne, dans la Marne. Et en 1876, fut découverte à la Gorge-Meillet [auj. Gorge-Mailly] sur le territoire de la commune de Somme-Tourbe (Marne), une extraordinaire tombe de chef gaulois enterré en armes sur son char de guerre, son casque de bronze déposé à ses pieds.

 

 

 

Joseph Déchelette est mort à Vingré (Aisne)

 

Vingré, panorama
Vingré (Aisne), le village
 

Vingré, ruines du village
Vingré (Aisne), ruines du village

 

 

l'hommage de Maurice Barrès à Joseph Déchelette

Dans Les diverses familles spirituelles de la France (1917), l'écrivain Maurice Barrès cite le nom et les mots de Joseph Déchelette.

 

Barrès sur Déchelette (1)

Barrès sur Déchelette (2)
Maurice Barrès, 1917 (éd. 1930, source)

 

 

 

l'hommage de la Société éduenne à Joseph Déchelette

La société savante d'Autun (société éduenne) dont Joseph Déchelette était membre lui a rendu hommage en 1919. Ci-dessous, un extrait relatif aux derniers moments du célèbre archéologue. (source)

Société éduenne, 1919 (1)

Société éduenne, 1919 (2)

Société éduenne, 1919 (3)

 

 

 

la tombe de Joseph Déchelette, dans la nécropole d'Ambleny (Aisne)

 

Ambleny, entrée cimetière
la nécropole d'Ambleny, près de Soissons

 

Ambleny, cimetière du Bois-Robert
nécropole d'Ambleny où est enterré Joseph Déchelette

 

tombe de Joseph Déchelette à Ambleny
tombe de Joseph Déchelette, nécropole d'Ambleny (Aisne) (source)

 

nécropole d'Ambleny
nécropole du Bois-Roger à Ambleny (Aisne) (source)

 

Ambleny, nécropole, Google maps, juin 2015 (1)
nécropole d'Ambleny (Google maps, juin 2015)

 

Ambleny, nécropole, Google maps, juin 2015 (2)
nécropole d'Ambleny (Google maps, juin 2015)

 

 

Joseph Déchelette, photo
Joseph Déchelette, mort le 4 octobre 1914

 

 

 

 

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28 septembre 2018

Marcel DELAY

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Marcel DELAY

 

 

DELAY Marcel, fiche MPLF - 1

 

Marcel Delay est né le 10 juillet 1891 à Rive-de-Gier. Il est mort le 24 août 1914 au col d'Urbeis dans les Vosges (Bas-Rhin). Il avait vingt-trois ans.

 

acte naissance Marcel Delay
acte de naissance de Marcel Delay

 

 

la fiche matricule de Marcel Delay

 

DELAY Marcel, fiche matricule
fiche matricule de Marcel Delay, né le 10 juillet 1891

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Marcel Delay, de Rive-de-Gier, finissait sa 2e année de service militaire, dans le camp de Sathonay, au mois d’août 1914. Soldat au 22e d’Infanterie, il était à cette époque secrétaire à la sous-intendance du camp.

C’est de là qu’il partit plein de courage avec son régiment pour Épinal et ensuite vers la frontière des Vosges.

Malgré les premiers revers, bien faits pour abattre les courages les plus résistants, surtout lorsqu’ils survenaient après les illusions de la première heure, Marcel avait su conserver la vaillance du parfait soldat. Son entrain n’avait point été une flamme passagère, il s’expliquait par un acte de volonté énergique, décidée à repousser toute inspiration dissolvante de découragement.

Il se battit donc avec vaillance au col d’Urbeis (Basse-Alsace) le 24 août lorsqu’une balle le frappa à la tête. Il mourait à 23 ans, non loin du poteau frontière, mais en terre allemande, où il est inhumé…

Nos jeunes héros n’ont pas besoin certes d’autre oraison funèbre que du simple récit de leur vie militaire, souvent si courte et presque toujours glorieuse. Il serait intéressant cependant de soulever le voile derrière lequel se cachent les vertus du jeune homme. Une main discrète a pu le faire en rappelant la mémoire de Marcel Delay : «C’était un enfant doux et bon». Ces deux mots font comprend quel vide laisse dans une famille l’absence d’un tel fils.

 

 

Marcel Delay appartenait au 22e R.I.

Il a effectué deux ans de service militaire dans cette unité (1912-1914).

 

22e_RI_vers_1910
soldats du 22e RI, vers 1910

 

le 22e RI en août 1914

L’Historique du régiment relate les opérations de l’été 1914. Cette unité appartient à la 55e Brigade de la 28e Division, du 14e Corps d'Armée. Au mois d’août, il participe, avec la 1ère Armée du général Dubail à une vaste offensive dont le but est l’invasion de l’Alsace alors occupée par les Allemands.

 

Jarménil
Marcel Delay a cantonné à Jarménil début août 1914

 

route de Jarménil
sur la route de Jarménil, soldat à vélo

 

Après avoir quitté son cantonnement de Jarménil (département des Vosges), Marcel Delay se rend à la frontière avec son régiment.

Le 13 août, les fantassins du 22 RI s’emparent des cols d’Urbeis et de la Hingrie, et dorment enfin en terre d’Alsace, avant de progresser les jours suivants vers d’autres villages de la province perdue en 1870.

C’est le 18 août qu’a lieu la dure bataille de Villé (ou de Gereuth) qui a contraint le 22e RI à la retraite. Mais le 21 août, il se rétablit sur les cols de l’Urbeis et sur celui du Climont.

Le 24 août, jour de la mort de Marcel Delay, une «puissante attaque ennemie se produit sur le front tenu par nos troupes depuis le col du Climont jusqu’au col de Sainte-Marie-aux-Mines» explique l’Historique du régiment. Dans les dix jours qui suivent, les combats ont causé de «lourdes pertes» au régiment. (source)

 

cols Urbeis et Hingrie, carte légendée
les cols d'Urbeis et de la Hingrie, à la frontière entre la France et le Reich allemand en 1914

 

 

Marcel Delay est mort au col d'Urbeis, dans les Vosges

 

Urbeis, carte en relief
les champs de bataille dans les Vosges, carte allemande ; au premier plan, le col d'Urbeis

 

Urbeis, la frontière en 1914
le col d'Urbeis était la frontière entre les Vosges (France) et l'Alsace, Bas-Rhin (Allemagne)

 

Urbeis, Kämpfe, 1914
combats de 1914, Urbeis (Vosges) ; carte allemande

 

col d'Urbeis de nos jours
le col d'Urbeis, de nos jours

 

au col d'Urbeis
vue du col d'Urbeis (source)

 

 

 

Autres anciens de Sainte-Marie ayant appartenu au 22e régiment d'Infanterie

 

 

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27 septembre 2018

Henri DESBENOIT

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Henri DESBENOIT

 

 

DESBENOIT Henri, fiche MPLF

 

Henri Desbenoit est né le 4 décembre 1886 à Roanne. Il est mort le 25 avril 1918, à Paris, des suites de maladie non contractée pendant le service. Il n'a pas la mention "mort pour la France". Il est titulaire de la Croix de guerre.

Il a effectué son service militaire d'octobre 1908 à septembre 1910, au 98e régiment d'infanterie à Roanne. Au bout d'un an, il avait obtenu le titre d'élève officier de réserve et fut nommé sous-lieutenant de réserve en avril 1910.

Henri Desbenoit s'est marié à Neuilly-sur-Marne le 6 novembre 1911 avec Hélène Louise Adèle Bon. Il était peintre et dessinateur.

 

 

acte de naissance d'Henri Debenoit/Desbenoit

 

acte naissance Henri Desbenoit
acte de naissance d'Henri Debenoit/Desbenoit

 

 

 

fiche matricule d'Henri Desbenoit

 

DESBENOIT Henri, fiche matricule (1)

DESBENOIT Henri, fiche matricule (2)
fiche matricule d'Henri Desbenoit, né le 4 décembre 1886

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Henri Desbenoit
de Roanne
Notes communiquées par la famille

Parti le 1er août 1914, comme sous-lieutenant au 232e régiment d’infanterie, Henri Desbenoit rejoignit son dépôt à Châtellerault, où il fut nommé chef de service téléphonique de campagne.

Dès les premiers jours de la guerre, le 232e est envoyé en Lorraine, pour la défense de Nancy, et prend position sur le Grand Couronné où ont lieu de terribles combats. C’est à la suite de ces opérations militaires qu’Henri Desbenoit est nommé lieutenant.

Peu de temps après, nous le retrouvons à Fleiens-Bernécourt (1), engagé dans les âpres luttes du bois de Mortemare (2). On sait combien ces combats furent sanglants. Mais le péril ne fait qu’aviver le courage et le lieutenant fait preuve d’un superbe sang-froid et d’une admirable bravoure : sa conduite fut remarquée et peu de temps après, il recevait la croix de guerre, avec une brillante citation à l’ordre du régiment :

  • «Depuis le début des opérations, le lieutenant téléphoniste Desbenoit s’est consacré avec un dévouement inlassable et une compétence entière à son service particulièrement important. En toutes circonstances et en particulier dans le secteur d’attaque devant le bois de Mortemare, les 13, 14 et 15 décembre 1914, et aux avant-postes sur le front Nomény/Port-sur-Seille, il a montré sous le feu une énergie qui a si bien maintenu le moral de sa section qu’elle a mérité d’être citée à l’ordre du régiment».

De nouveau, le 232e est envoyé en Lorraine et pénètre le premier dans Nomény en ruines. Sans cesse en première ligne, il séjourne à Pont-à-Mousson et à Port-sur-Seille. Avec la même activité, le lieutenant Desbenoit assure un service extrêmement pénible et dangereux : aussi ses chefs le proposent pour le grade de capitaine et il n’a pas encore 29 ans.

Mais, hélas ! à ce poste de dévouement, sa santé s’altère. Atteint d’une forte fièvre et de bronchite grave, il ne veut point se laisser évacuer. Ce n’est qu’après avoir assuré son service et mis au courant son remplaçant qu’il consent à partir. Malheureusement, il est trop tard.

Malgré des soins assidus pendant deux ans, il ne peut triompher du mal et meurt à Paris, à l 'âge de 31 ans, le 25 avril 1918.

Les honneurs militaires lui ont été rendus et c’est dans les plis du drapeau tricolore qu’il a été conduit à sa dernière demeure.

Le lieutenant Desbenoit laisse un souvenir ineffaçable au cœur de ceux qui l’ont connu et aimé. Son caractère noble et bon, sa belle intelligence, ses connaissances étendues étaient appréciés de tous.

Artiste peintre et décorateur de talent, passionné pour son art, il laisse à son jeune fils des œuvres très personnelles. Avec tant d’autres, c’est une nature d’élite qui disparaît. Il est tombé glorieusement pour la France.

1 - Probablement une erreur ; il faut lire : Flirey et Bernécourt.

2 - Le bois de Mort-Mare se situe au nord de la commune de Flirey (Meurthe-et-Moselle).

 

 

Henri Desbenoit a combattu au bois de Mort-Mare (Flirey), en décembre 1914

 

Mort-mare, bois
bois de Mort-Mare, Flirey en Meurthe-et-Moselle (source)

 

Allemands dans bois de Mort-Mare, 1915
les Allemands dans les bois de Mort-Mare, en 1915

 

 

 

en 1915, il était aux avant-postes sur le front Nomény/Port-sur-Seille

 

Nomény, tombe dans une rue, déc 1914
front de Nomény, tombe dans une rue, décembre 1914

 

Nomény, barricade, 1915
front de Nomény (Meurthe-et-Moselle), barricade, 1915

 

Port-sur-Seille, ruines
Port-sur-Seille (Meurthe-et-Moselle), ruines du village

 

front de Pont-sur-Seille, messe célébrée par un aumônier
front de Port-sur-Seille : messe célébrée par un aumônier militaire

 

 

 

 

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26 septembre 2018

Jean DUCLAUX DE MARVILLE

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Jean DUCLAUX DE MARVILLE

 

 

DUCLAUX DE MARVILLE Jean, fiche MPLF

 

 

Jean Duclaux de Marville est né le 23 août 1894 à Cherbourg (Manche). Il est mort le 3 août 1916 à Verdun (Meuse), secteur de Tavannes.

Son père (Louis Jean Duclaux de Marville) était colonel d'infanterie de Marine, issu d'une famille qui comptait des nobles (cf. Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, par C. d.E.-A., Évreux, 1912).

Jean s'est engagé pour trois ans le 7 octobre 1912 à la mairie de Valence (Drôme) pour le 6e régiment d'Artillerie. Il est devenu brigadier en mai 1914, puis maréchal des logis en novembre 1914.

En décembre 1915, il passe au 414e régiment d'infanterie et est nommé sous-lieutenant à titre temporaire le même mois.

 

 

fiche matricule de Jean Duclaux de Marville

 

DUCLAUX de MARVILLE Jean, fiche MPLF (1)

DUCLAUX de MARVILLE Jean, fiche MPLF (2)
fiche matricule de Jean Duclaux de Marville

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Jean Duclaux de Marville
de Saint-Donat

Jean Duclaux de Marville aspirait, de vieille date, à la carrière militaire. C’était chez lui une vocation, conforme aux traditions de sa famille et en pleine harmonie avec son caractère : excellentes conditions, il faut le reconnaître, pour qu’il fût, sur les champs de bataille, soldat intrépide et plein d’entrain.

Engagé volontaire en 1913, au 6e régiment d’artillerie, il partit à la mobilisation, avec le grade de brigadier. Bien décidé à faire tout son devoir, soutenu dans son patriotisme par une piété solide qui ne se démentit jamais, il donna de suite la mesure de sa valeur.

Dès le début de sa campagne, le 10 octobre 1914, sa belle conduite au feu lui valut les galons de maréchal des logis.

Le 1er décembre suivant, au cours du bombardement de Fontaines-les-Coppy (Somme), le poste de commandement de sa batterie s’étant effondré sous une rafale de 210, il mérita cette belle citation à l’ordre du régiment :

  • «Sous le feu précis et violent de l’artillerie ennemie, a, avec un mépris complet du danger, travaillé à secourir immédiatement ses chefs et ses camarades ensevelis».

Au courant d’août 1915, il demandait à passer dans l’infanterie, «pour voir l’ennemi de plus près», écrivait-il à son beau-frère, et le 13 décembre 1915, il était nommé sous-lieutenant à la 2e compagnie du 414e régiment d’infanterie. Là, comme dans l’artillerie, sa bravoure et son haut sentiment du devoir lui conquirent bientôt la confiance de ses chefs et l’affection de ses hommes.

Le 3 août 1916, au cours d’une attaque au Chênois (sous-secteur de Tavannes), sa section étant en soutien d’une compagnie de mitrailleuses, il reçut l’ordre de se porter en avant.

Comme il entraînait sa section, une balle le frappa dans la région du cœur. Il n’eut que la force de dire à ceux qui s’empressaient autour de lui : «Je suis perdu ; ne vous occupez pas de moi ; continuez !»

Ce dernier acte d’abnégation dans l’accomplissement du devoir lui valut une seconde citation, celle-ci à l’ordre général de la 2e Armée :

  • «Très brave officier ; blessé mortellement, le 3 août 1916, s’est adressé à ses hommes en leur disant : "Je suis perdu ; ne vous occupez pas de moi ; continuez"» (22 septembre 1916).

On comprend sans peine qu’avec ces qualités, il ait été regretté de tous.

Cette mort, écrivait un soldat au lendemain de l’événement, a été bien pénible pour nous qui l’avons connu et aimé… C’était un brave et un courageux, adoré de tous ses hommes».

Malheureusement, il ne fut pas possible de lui assurer une sépulture. Son ordonnance l’avait mis dans un trou d’obus, comptant le reprendre, le soir, pour le transporter à la batterie de l’hôpital. Mais le terrain avait été tellement ravagé par un feu d’enfer qu’il ne put être retrouvé.

 

 

 

Jean Duclaux de Marville meurt à Verdun, secteur de Tavannes

Dans le J.M.O. du 414e régiment d'infanterie, à la date du 3 août 1916, on peut lire : «À 9 heures, l'attaque se déclenche, mais elle est uniquement menée par le 1er bataillon [celui du sous-lieutenant Duclaux] qui réussit à s'accrocher et à se maintenir, malgré un violent feu de mitrailleuses et d'artillerie, au bord du plateau de Retegnebois (cote 359, lisière sud de Retegnebois et clairière entre ce bois et la Haie Renard)».

Cette localisation est repérable sur les deux cartes ci-dessous.

 

secteur de Tavannes, carte légendée
(source du fond de carte)

 

secteur Tavannes, 3 août 1916
secteur de Tavannes : plateau de Retegnebois, cote 359, Haie Renard

 

 

 

la mort du sous-lieutenant Duclaux, dans le J.M.O.

 

pertes du 414e Ri, 3 août 1916, Duclaux
Jounal des marches et opérations (JMO) du 414e RI : pertes début août 1916

 

 

 

 

 

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25 septembre 2018

Ennemond DUCLOS

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Ennemond DUCLOS

 

 

DUCLOS Ennemond, fiche MPLF

 

 

Ennemond Duclos est né le 29 mars 1886 à Allex (Drôme). Il est mort le 27 mai 1918 à Courcelles (Aisne). Il avait trente-deux ans.

Il est entré au collège Saintre-Marie en 1904.

Il effectue son service militaire d'octobre 1907 à septembre 1909, au 52e régiment d'infanterie, à Montélimar.

Il devient lieutenant en 1916.

 

 

fiche matricule d'Ennemond Duclos

 

Ennemond Duclos, fiche matricule (1)

Ennemond Duclos, fiche matricule (2)
fiche matricule d'Ennemond Duclos, né le 29 mars 1886

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Ennemond Duclos
de Saint-Chamond

«Mon fils s’appelle Ennemond et non pas Edmond», disait sa mère en présentant pour la première fois au Supérieur d’alors le nouvel et petit élève de Sainte-Marie.

C’était affirmer son origine bien saint-chamonaise. Aucun nom n’est en effet plus connu et plus estimé dans la ville de Saint-Chamond.

Ennemond avait été précédé au collège par son aîné ; mais il faut bien le reconnaître, les deux frères pouvaient être confondus dans la même estime de tous leurs maîtres, grâce à leur conduite exemplaire. Ennemond, lui aussi, fut un modèle, à tous les points de vue, et les dons de l’intelligence rehaussaient encore chez lui ceux du caractère. Aussi n’y eut-il aucune hésitation dans le conseil des maîtres pour décerner à l’excellent philosophe de 1904 le prix d’honneur, offert par l’association des Anciens élèves. Les applaudissements chaleureux qui soulignèrent le nom du cher lauréat avaient une signification évidente, résumée dans ce verdict infaillible des collégiens : «Il l’a bien mérité !»

Jeunesse studieuse, conduite exemplaire, piété fervente : ces trois mots traduisent tout ce qu’il fit et tout ce qu’il fut pendant dix ans, jusqu’à la déclaration de guerre.

Puis, comme toutes les natures généreuses, il ne se contentait pas d’être bon pour lui-même, mais il était heureux de se donner. Il avait un tempérament d’apôtre, et lui que bien des contacts pénibles auraient dû froisser pendant l’étape du service militaire, il s’estimait content de pouvoir exercer une salutaire influence.

Avec beaucoup de savoir-faire, il cherchait à combattre les préjugés de ses compagnons d’armes. Il présentait la vérité religieuse d’une façon si convaincante qu’on subissait aisément l’ascendant de son intelligence, de ses exemples et de sa piété. Cependant ce n’était point un «combattant». Il semblait plutôt doux et timide. Tant il est vrai que la conviction à elle seule est une force à laquelle rien ne résiste ! Toute sa conduite était une prédication. De cette prédication nul n’aurait osé contester la loyauté, et comme ses formes étaient toujours charitables et courtoises, on se rendait vite aux raisons du soldat Duclos.

Le 4 août 1914, il dû rejoindre sans retard le 252e d’infanterie à Montélimar. Parti comme caporal, il fut nommé sergent en décembre de la même année et gagnait, le 6 avril 1915, les galons du sous-lieutenant.

Ce fut près de Verdun qu’il mérita sa première citation, à l’ordre de l’armée, le 6 août 1916 :

  • «Modèle d’énergie, de décision et de sang-froid, il a, grâce à ses qualités, conservé inviolé le secteur confié à sa compagnie, placée elle-même en saillant très prononcé, subissant pendant six jours un bombardement très violent d’artillerie lourde et repoussant trois attaques de l’ennemi à la grenade».

Avec cette citation, il recevait encore la médaille de Sainte-Anne de Russie.

Deux ans après, nous le retrouvons au combat de l’Aisne. Rien n’a fléchi dans son attitude ; il n’était pas homme à se laisser entamer au point de vue moral. Lieutenant depuis le 22 mai 1916, et bientôt promu au titre de capitaine - sa nomination n’a pas eu le temps de paraître à l’Officiel - il donnait à tous, comme autrefois, comme au début de la guerre, l’exemple du plus pur patriotisme. Jusqu’au bout, il s’était imposé d’être l’homme du devoir.

Une deuxième citation à l’ordre du corps d’armée le 27 juin 1918, après le combat de l’Aisne, rend honneur à son mérite :

  • «Commandant de compagnie d’une haute valeur morale, le 27 mai 1918, envoyé en renfort et se trouvant en face d’un ennemi très supérieur en nombre, a manœuvré de façon à lui infliger des pertes sanglantes. A maintenu sa compagnie sous le feu jusqu’à la dernière limite».

Sa haute valeur morale ! C’est bien le terme qui répond le plus exactement à l’ensemble de ses qualités. Il n’était point un officier ordinaire, et sa mère - les mères lisent si profondément dans le cœur de leurs enfants - résumait en un mot toutes les qualités de son cher Ennemond : «Il avait au plus haut degré le culte du devoir. Au milieu de ms larmes, je suis si fière de mon fils ! ».

 

 

Ennemond Duclos est mort lors du franchissement de la Vesle,

à Courcelles, le 27 mai 1918

 

Courcelles sur le front, 27 mai 1918
Courcelles sur le front de l'offensive allemande, 27 mai 1918

 

progression allemande, 27 et 28 mai 1918, légendée
Courcelles sur le front de l'offensive allemande, 27 mai 1918 (source du fond de carte)

 

Historique du 252e Ri, 27 mai 1918
extrait de l'Historique du 252e Ri : la retraite du 27 mai 1918

 

la Vesle, alentours de Courcelles
la Vesle aux alentours de Courcelles, aujourd'hui

 

la Vesle, alentours de Courcelles (2)
la Vesle aux alentours de Courcelles, aujourd'hui

 

la Vesle, à la sortie de Courcelles
la Vesle à la sortie sud de Courcelles, aujourd'hui

 

Courcelles, juillet 1918
Courcelles, après les combats de juillet 1918

 

 

 

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24 septembre 2018

Thomas DUGAS

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Thomas DUGAS

 

 

DUGAS THomas, fiche MPLF

 

 

Thomas Dugas est né le 13 août 1857 à Saint-Chamond. Il est mort le 22 mars 1915 à l'hôpital mixte de Poitiers. Il avait cinquante-sept ans.

Il semble qu'il avait quitté l'armée et qu'il était revenu, lors de l'entrée en guerre en août 1914, dans son régiment, le 49e d'Artillerie (70e batterie). Il habitait jusqu'alors à Cannes.

Son acte de décès nous apprend qu'il était chevalier de la Légion d'honneur.

 

acte de naissance de Thomas Dugas

 

acte naissance Thomas Dugas
acte de naissance de Thomas Dugas, 13 août 1857

 

 

 

fiche matricule de Thomas Dugas

non trouvée pour l'instant

 

 

 

Thomas Dugas était officier au 49e régiment d'Artillerie, à Poitiers

 

caserne du 49e d'Artillerie à Poitiers
caserne d'Abboville du 49e régiment d'Artillerie (49e RA), à Poitiers

 

soldats du 49e d'Artillerie, vers 1913
militaires du 49e RA, carte photo envoyée par un soldat en décembre 1913

 

 

 

acte de décès de Thomas Dugas

 

acte décès Thomas Dugas
acte de décès du capitaine Thomas Dugas, à Poitiers, 22 mars 1915

 

 

la mort de Thomas Dugas, signalée dans L'Express du Midi

 

L'Express du Midi (Toulouse), 11 avril 1915, légendé
L'Express du Midi (Toulouse), 11 avril 1915

 

 

 

 

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23 septembre 2018

Jules DUPIN

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

Jules Dupin, deux portraits

 

 

Jules DUPIN

 

 

DUPIN Jules, fiche MPLF

 

 

Jules Dupin est né le 24 mai 1890 à Feurs (Loire). Il est mort le 26 juillet 1915 à Linge (Alsace). Il avait vingt-cinq ans.

Après avoir bénéficié de deux sursis, il renonce au troisième et entre dans les Chasseurs alpins en août 1913. C'est dans ce régiment, le 30e bataillon de Chasseurs alpins, qu'il effectue ensuite la guerre.

Jules Dupin était un poète, un esprit délicat, féru de littérature et d'arts. Il est entré au collège Sainte-Marie en classe de 3e, venant de Montbrison, et obtient le baccalauréat en 1907.

 

 

fiche matricule de Jules Dupin

 

Jules Dupin, fich matricule (1)

Jules Dupin, fiche matricule (2)

Jules Dupin, fiche matricule (3)
fiche matricule de Jules Dupin, né le 24 mai 1890

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Jules Dupin
de Montbrison

Nous empruntons à la Préface du Journal de Jules Dupin les lignes suivantes. Elles sont le meilleur résumé de sa vie avant la carrière militaire :

Jules Dupin est né à Feurs (Loire) le 24 mai 1890. Il passa sa première enfance à Montbrison où habitaient ses parents. Il fut d’abord placé par eux au collège de cette ville dont il suivit les études en qualité d’externe, jusqu’en 3e et où il fit sa première communion. Il entra ensuite comme pensionnaire au collège Sainte-Marie, à Saint-Chamond. Il passait l’époque des vacances, soit à Rambert-sur-Loire, dans une propriété appartenant à ses grands-parents maternels, soit en voyage.

Très jeune, il étonnait souvent son entourage par l’élévation de son âme, la vivacité de son imagination, le caractère personnel de ses idées, par son amour passionné du beau, et par la justesse de ses appréciations sur les œuvres qui le lui révélaient.

Les notes qu’il a laissées (elles forment un volume, édité par les soins de sa famille) permettent difficilement de mesurer l’étendue de ses connaissances qui plus tard devint remarquable. Ces connaissances, il ne cherchait pas à en faire étalage ; mais lorsqu’il se sentait compris, il parlait de toutes les choses qu’il aimait, littérature, musique, arts plastiques, voyages, avec un enthousiasme, une fougue, une flamme de jeunesse qui rendaient sa conversation charmante ; il savait être gai, malgré une mélancolie native qui confinait parfois à la tristesse et dont certains feuillets de son journal sont imprégnés.

Il nous semble qu’à mesure qu’on verra cette âme si ardemment éprise de beauté se découvrir dans l’adolescent, puis dans l’étudiant, enfin dans le soldat, on reconnaîtra qu’elle justifiait pleinement cette pensée d’un autre homme, mort également avant d’avoir pu réaliser les promesses qu’il portait en lui : Alfred Tonnellé :

«On éprouve un besoin d’être pur pour s’approcher du beau, et de rester pur après l’avoir contemplé».

Ces quelques lignes laissent deviner de suite que Jules Dupin appartint de bonne heure à une élite. Jusqu’à la fin, il se distingua, et en employant ce terme avec toute sa force significative, nous voulons dire qu’il tint à honneur d’éloigner de son âme tout ce qui pouvait paraître vulgaire.

 

Jules Dupin, 1905
Jules Dupin, en 1905

 

A - Le collégien

Dès sa jeunesse, Jules Dupin avait pris l’habitude de porter sur lui de petits carnets pour noter ou des pensées ou des poésies. Ceux de 1905 se rattachent à son année de seconde. De courts extraits suffiront à montrer ce qu’il était déjà ;

«Il est au collège une devise dont on ne peut se passer. Je la prends dans une chanson comique qu’on nous a dite aujourd’hui : Le devoir avant tout !»

«La joie est le salaire du travail. Je l’ai expérimenté. On est heureux d’avoir fait son devoir, pour être récompensé d’avoir fait plaisir à Dieu, d’avoir contenté ses parents, de s’être fait plaisir à soi».

La pente de ses réflexions le conduisait aisément vers Dieu et alors sa pensée se transformait en prière :

«Je demande à Dieu de l’aimer ; de faire et de souffrir ce que j’aurai à faire et à souffrir, en pensant à lui toujours, même dans les joies. Qu’il m’aide à faire toujours mon devoir».

À son année de Rhétorique, couronnée par de brillants succès, on pourrait donner comme exergue cette réflexion tracée au lendemain de son baccalauréat, sur la plage de Mimizan :

«De toute son âme ! Oh ! quelle devise pour un jeune homme : faire tout de toute son âme ; travailler, aimer, croire, espérer de toute son âme !» Ce programme, il l’avait réalisé d’une façon supérieure, et l’on sent, à ses diverses réflexions, qu’il apportait au travail de son Ascension morale, une vigueur peu commune : «J’ai l’ambition de me distinguer des autres ; cette idée m’enthousiasme ; pour elle, je vais travailler».

«Mon Dieu ! faites que je vous aime dans l’étude et le travail ; faites que vivant avec le monde, je n’aie pas la frivolité du monde, mais goûte la paix des âmes qui savent réfléchir».

Pendant son année de Philosophie (1906-1907), il semble qu’il ait cédé avec moins de résistance à cette mélancolie dont il savourait, au fond, les inspirations idéales : «Mon travail de philosophie me pèse et me fatigue, je sens que je ne suis pas fait pour ces études trop réalistes et ardues. Je ne cherche pas là mon idéal et je ne m’y intéresse pas. Pas de vie, des choses inanimés, rien qui touche à la corde sensible de l’âme…»

Ce qui ne l’empêcha pas d’être reçu bachelier en juillet avec la mention bien. Il avait alors 17 ans. Chacune de ses étapes scolaires s’était terminée par un succès solide, éclatant. En Seconde il avait remporté 12 prix, dont 11 premiers ; en Rhétorique, 15, dont 14 premiers ; en Philosophie, il obtint tous les premiers prix de sa classe et en outre le Grand prix d’honneur offert par l’association amicale des Anciens élèves.

Mais surtout il avait réalisé son programme, non point pour effacer les autres : il connaissait le prix de la bonté, lui qui écrivait alors cette belle réflexion : «Être bon, aimable, pour ceux qu’on aime, pour ceux qu’on n’aime pas, pour ceux qu’on déteste», mais pour se rapprocher d’un peu plus près de son suprême Idéal, Dieu !

 

B - L’étudiant

Suivant le désir de ses parents, il se rendit à Lyon, en novembre, afin de commencer son Droit. En même temps et pour satisfaire ses goûts personnels il préparait sa licence ès lettres (section de grammaire). Il était installé avec son frère aîné dans un petit appartement donnant sur la place Ollier, en face du Rhône et de Fourvière.

Là, comme autrefois au collège, il se plaît à consigner ses souvenirs dans son carnet. Les mêmes pensées l’inspirent et trahissent sa constante aspiration vers l’Idéal :

«J’ai la nostalgie de l’éternité… Maman me disait un jour que cette idée l’éternité lui faisait peur ! Oh ! moi, non, elle est ma vie !» Toujours saisi par la grande idée du devoir - «La science du bonheur consiste à aimer son devoir et à y trouver son plaisir » - il ne néglige rien de ses études obligatoires, mais il sait trouver le temps de lire, et de lire beaucoup. On devine où l’emportent ses prédilections, Maurice de Guérin, Laprade, Châteaubriand, Montalembert, Longfellow, Basin, de Maistre (Xavier), Perreyve, Tonnellé, ces noms se retrouvent souvent sous sa plume, et il parle avec émotion de ces lectures qui l’élèvent. Puis il goûte en artiste les nobles jouissances de l’art musical ; il se fait dans sa chambre un petit musée avec ses gravures : Vierge d’Hébert, Jeanne d’Arc de Chapu, l’Idéal sortant de la matière brute, Vierge chrétienne en prière, Anges de Raphaël, Vierge du Grand-Duc, et de ces gravures il peut dire : «Je les aime, elles me parlent et sont un peu de moi-même !»

Lorsque le travail mérite d’être interrompu pour qu’il ne se transforme point en fatigue, il va demander aux spectacles de la nature, dans de belles promenades, la détente dont il a besoin ; il la demande surtout à son cher Montbrison, à son foyer où il trouve de si chaudes affections, à cette mère qui le comprend si bien, dit-il, et pour laquelle il professe le culte d’Ozanam pour la sienne ! Aussi éprouve-t-il toujours la même peine à «dire adieu», ne serait-ce que pour quelques jours.

«Départ de Montbrison ! Oh ! ces départs si pleins de mélancolie ! Pourquoi partir ? Laissez-moi m’arrêter ! Oh ! jamais je ne jouirai bien que pendant mes longues vacances !»

On comprend, d’après toutes ces notes et ces souvenirs, que Jules Dupin fut toujours à Lyon l’étudiant sérieux, qui n’admet aucune transaction avec le mal. Après une communion, il songe, dit-il, à la beauté du jeune homme heureux de pourvoir se dire : «Mon cœur est pur, mon âme ne s’attache point aux vétilles de ce monde. Elle repousse avec horreur les grossièretés, les légèretés, les méchancetés, et les impuretés de ce monde… Soyons de ceux-là ! soyons des âmes vibrantes !»

Oui il était de ceux-là, parce qu’il voulut ressembler aux meilleurs, et avec eux «aimer le beau, le vrai, le bien follement».

Dans cette atmosphère de travail, de piété et de vertu, il assurait le succès de ses diverses études. En juillet 1908, il passa très brillamment ses examens de première année en droit, et fut reçu licencié ès lettres au mois de juin 1910.

Il donna alors une orientation nouvelle et définitive à ses études. Ses parents voyant que ces goûts l’attiraient d’une façon spéciale vers la carrière des lettres lui avaient permis d’abandonner ses études de droit. Il se consacra donc uniquement à la préparation du Diplôme d’études supérieures ; on sait que ce diplôme suppose une étude approfondie de littérature ou d’art, et Jules se mit à réunir les éléments nécessaires pour composer un mémoire sur les œuvres poétiques et dramatiques de Madame de Staël. Ce travail l’intéressa dans la mesure même de l’application exigée pour qu’il fût vraiment original. Comme toujours il le fit «de toute son âme !», et le succès fut la récompense de son travail.

Il fallait alors songer à monter encore. C’est pour se préparer à l’Agrégation qu’après les plus agréables vacances égrenées entre l’Italie, Mimizan et son cher Montbrison, il dut s’installer à Paris. On le vit donc arriver au 104 de la rue de Vaugirard, excellente maison de famille, où là aussi un directeur plein de zèle se donne pour mission de grouper une élite et y réussit pleinement : Jules Dupin apprécie de suite ce milieu distingué et intelligent : «Je suis vraiment très bien… Bibliothèque, salle de journaux, salle de bridge, bonne nourriture, camarades agréables, dont plusieurs fort intelligents».

Il y contracta les plus solides amitiés et se fit une place bien à lui dans ce groupement d’étudiants sérieux, surtout préoccupés de fonder leur avenir sur la vertu et la piété.

Paris le charma donc sans l’éblouir. Il apprit à en connaître et à en admirer les monuments ; il profita largement des circonstances, si facilement trouvées, d’entendre des écrivains de marque, de suivre d’illustres conférenciers, de faire la connaissance de ces Directeurs des Jeunes, à l’esprit assez hospitalier pour se mettre en contact avec les étudiants les plus avides de se perfectionner et de se donner un peu plus d’ouverture d’âme. À ce point de vue, la réunion du 104 est un centre des plus vivants. Ceux qui patronnent ce cercle - ce sont à Paris les plus illustres parmi les académiciens et les hommes d’œuvre - ne comptent ni avec leurs occupations, ni avec leur temps pour entrer en relations avec les jeunes. Jules Dupin sut profiter de ce patronage et se procurer ainsi d’utiles excitations pour travailler avec plus de profit et d’élan.

Puis, grâce à d’excellents camarades, il fonda un cercle littéraire, avec réunions intimes, travail en commun, revue à lancer. Désormais il écrit des articles, il fait des poésies pour les Intimités ! «Notre petite revue poétique s’annonce très bien». C’est un beau temps pour cette âme, heureuse de s’épanouir au souffle de toutes les grandes idées qui circulent autour d’elle. Aussi peut-il écrire en toute sincérité : «J’aime mes camarades, j’aime Paris, le mouvement, les jardins, les musées et surtout les églises de Paris : Saint-Germain-l’Auxerrois, Saint-Étienne-du-Mont, Saint-Séverin, Saint-Germain-des-Prés, Notre-Dame ! J’aime les merveilleuses perspectives de ses quais, de ses places, j’aime la vie qui se dégage de tout cela. Certes oui, je suis heureux, je vis ardemment, je me nourris de grandes et belles choses, et puis surtout je veux être heureux, c’est une énergique volonté chez moi».

Il aurait pu ajouter : j’aime aller à Dieu comme je me plais à courir vers toutes les manifestations de la vraie beauté. «Je viens de passer une belle nuit à la Basilique du Sacré-Cœur ! Nuit d’adoration et de calme ! J’étais heureux de me senti sans travail, sans pensée devant le Sacré-Cœur qui m’écoutait».

Il entre même dans le Tiers Ordre de Marie : «J’ai voulu entrer dans ce tiers ordre en souvenir de mon frère Charles… À dater de ce jour, 25 février 1913, je fais mon existence plus recueillie, plus pieuse, plus soucieuse de l’intégrale pureté morale, plus gaie, plus régulière en un mot, car c’est bien le propre du moine d’avoir une vie réglée.

«Les oiseaux chantent ! Le jour est levé ! Petit novice de la sainte vierge, chante, toi aussi, chante, petit poète… Tous les jours je veux écrire un quart d’heure ! Ce sera ma méditation prescrite par le Tiers Ordre».

Entre temps, il prépare des articles pour la Revue Montalembert, organe mensuel de la réunion des étudiants. Il rêve toute une œuvre qu’il voudrait appeler histoire d’âmes : Rosa Ferruci, Alfred Tonnellé, Albert de la Ferronays, Mgr d’Hulst, Maine de Biran… Ce travail l’attire, et il trouve ainsi l’occasion de monter avec ceux qu’il voudrait «de tout cœur imiter».

Enfin, il multiplie les occasions de se procurer les jouissances artistiques les plus vives, en allant visiter des sanctuaires célèbres, nos belles cathédrales du Moyen Âge ; Notre-Dame de Chartres en particulier devint pour lui une «patrie de rêve». C’est que désormais, au lieu de préparer l’agrégation ès lettres, trop contraire à ses goûts, il s’orient vers le doctorat. Pendant toute l’année 1913, il se donne avec passion à la composition de sa double thèse. Les sujets choisis expliquent ses visites aux monuments du Moyen Âge et ses lectures de prédilection. La première thèse a pour objet «Le catholicisme romantique, son histoire, son action, les hommes qui l’ont créé, défendu : Ozanam, Rio, Montalembert ; leur œuvre». La deuxième thèse sera sur «La représentation de la Vierge Mère en France dans la sculpture, du XIIe siècle au Concile de Trente, 1563».

De cette période si active, recueillons encore deux souvenirs. Le premier est celui d’un petit volume de poésies, avec ce titre significatif Ascension du Cœur, auquel il consacra le meilleur de son âme. Il lui fallait bien donner une forme vivante à tant d’aspirations vers tout ce qui est beau, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable. Avec un peu d’enthousiasme, il appelle son manuscrit «sa chère œuvre», et il en donne le sens :

Infatigable, il faut par les chemins perdus
Pleurer, gémir, crier, mais parvenir au but.

«J’ai mis toute mon énergie à l’atteindre, ce but merveilleux, me donnant à moi-même l’image de la vie, de la lutte pour la beauté».

Le second souvenir se rattache à ses retraites annuelles à Clamart. À la fin de chaque étape scolaire, les meilleurs d’entre les étudiants du 104, le plus grand nombre va se recueillir dans la villa Manrèze. Qui a passé trois jours dans cette atmosphère de paix et de vie surnaturelle ne saurait oublier les émotions ressenties. Jules Dupin ouvre toute son âme à ces influences divines. C’est là qu’il trace ces lignes vibrantes, sous forme de programme : «Pour que ma conduite soit plus irréprochable, il me faut être chrétien sans restriction, sûr de la beauté, de la légitimité de ma mission… Mon Dieu, je vous consacre mes forces, ma vie, mon temps, mes membres pour travailler à vous conquérir des âmes par l’art et par la poésie, cet art bien compris, cette poésie qui vient de nous et qui nous mène à vous».

Mais l’âme du chrétien, du poète doit apercevoir le calice de la souffrance, et ne point repousser d’instinct cette coupe où il devine l’amertume. Le retraitant y songe en priant :

Mon Dieu
Donnez à votre enfant repentant de vous plaire,
Donnez-lui de savoir en Vous s’abandonner,
Pour que, quand il sera meurtri par la misère,
Il soit heureux, alors, pour avoir tant prié.

Et nous arrivons à cette heure de la souffrance, du sacrifice. Heureux l’étudiant qui a fait près de l’autel sa veillée d’armes pour être prêt à toutes les immolations.

 

Jules Dupin, en uniforme

 

C - Le soldat

Il est donc parti pour le service militaire. «Poussé, nous dit son meilleur confident, par son amour de la montagne. Jules s’était brusquement décidé à devancer de deux mois l’époque du service militaire, pour avoir la faculté d’entrer dans les chasseurs alpins. Il espérait pouvoir poursuivre au régiment ses études de doctorat alors fort avancées et les terminer dès son retour à la vie civile».

Cette première année se passe sans incident notable. Il aime son uniforme : «Je suis fier d’être alpin», il se heurte sans doute et souvent aux réalités de la caserne ; mais son capitaine est charmant, mais on le félicite sur son énergie à l’exercice, mais il revient souvent se retremper à la bienfaisante influence du foyer, dans son cher Forez, mais il songe beaucoup à ses fiançailles, à son avenir ensoleillé, et il se fait dire, sous un pseudonyme facile à déchiffrer, cet appel à l’espérance :

Prie et lutte et le jour de l’éternel revoir,
Nous serons plus heureux et meilleurs l’un par l’autre ;

mais il sent qu’il peut faire du bien autour de lui, et au bout de quatre mois, il confie à son cahier cette note révélatrice : «Que dire de mon service ? J’y ai trouvé des joies et des tristesses, des gaîtés factices et des abattements terribles. Que dire ! sinon que je n’ai pas changé, que j’ai toujours gardé la même âme, celle que dépeint mon cahier depuis 1908 !»

Pour un fils aussi attaché à la vie familiale, on comprend ce que la séparation imposée par la guerre eut de déchirant. Il ne craint pas de le dire, mais il jette au-dessus des paroles de tristesse son cri «espoir et confiance», et désormais il ira en avant dans la rude montée des batailles comme il est toujours allé plus haut dans les ascensions du cœur.

Jules Dupin partit donc pour les Vosges, avec son bataillon, le 10 du mois d’août. Il avait le titre de caporal-fourrier. Le 25 septembre, il était nommé sergent. Choisi comme agent de liaison auprès de son commandant, il voit la mort de bien près : «J’ai reçu, dit-il, une quantité si grande d’obus au Col du Bonhomme que je suis étonné de vivre encore». En décembre, il est dans la tranchée, à la Tête de Faux, à 1200 mètres d’altitude, «plus près de Dieu, dit-il», et ainsi veut-il «élever son âme !» Sursum !

Dans la nuit de Noël, il prit part à un violent combat, et sa brillante conduite lui mérita d’être cité à l’ordre du jour de sa division et nommé sergent-major chef de section.

En avril, il change de secteur. Vivre dans les boyaux lui avait paru spécialement dur, à lui si avide de larges et hauts horizons : «Pensez donc, vivre en dehors de la vie civilisée, depuis si longtemps ! J’ai des nostalgies de poésie, des nostalgies d’art, de beauté, de religion». Aussi quelle sorte d’ivresse, lorsqu’il doit s’installer dans les bois : «Je suis dans une forêt remplie de chants d’oiseaux et de murmure du vent… Envoyez-moi des articles sur la musique, la peinture, la sculpture, des fragments de poème ; tout me fait plaisir». Il s’organise donc une cagna, comme un petit palais… Sur sa table, il installe ses livres : «Il y a le livre de bon papa, le livré de Prénat (1), Intimités, les Ascensions du Cœur, les Cent meilleurs poèmes, Verlaine, Péguy, etc.» C’est l’idéal toujours rêvé qu’il rapproche le plus possible de la réalité.

Le 6 juin, il est nommé sous-lieutenant : sa vie devient plus active ; il trouve même parfois que la besogne est bien lourde pour lui. Mais ce qui le délasse, ce sont des conversations élevées avec un jeune chasseur, de vingt ans, simple soldat, en qui il retrouvait ce que «le Sillon lui avait fréquemment montré», désir d’apostolat, amour de la famille et vocation pour le service militaire. L’officier était content d’apporter à son soldat l’encouragement, les bonnes paroles «qui disent de croire» malgré tout.

Vers la mi-juillet, il attend, dans une surexcitation fébrile, les opérations annoncées. La première phase de la «grande tourmente» se déroule selon ses prévisions, et elle est terrible. Presque tous les officiers de son bataillon sont tués ou blessés ; il a perdu dans sa section un sergent et deux caporaux. «Le soleil est de trop, prétend-il, sur cette vision d tristesse… Mon Dieu, Mon Dieu, pitié !»

Ces mots sont les derniers qu’il ait écrits. Le lendemain, 26 juillet, il tombait frappé à la tête. Il avait enlevé avec sa section la crête du Lingekopf et payait de sa vie cette ascension vers une cime d’Alsace !

Selon le récit de son chef de bataillon, la 6e compagnie était en tête de l’attaque. Elle surprit l’ennemi par l’impétuosité de son élan, dépassa la crête et s’arrêta de l’autre côté.

Pour organiser la conquête, il fallut s’exposer. «Le sous-lieutenant Dupin faisait tout son devoir sans hésiter. Une balle le tua net. Ainsi se terminait à peine éclose une carrière d’officier. La noblesse de cœur, l’élévation de ses pensées s’imposèrent à mes réflexions et je saluais respectueusement ce jeune héros».

Noblesse de cœur, élévation de pensées : il est impossible de ne point souscrire à cet éloge. Jusqu’à la fin, comme on l’a fort bien dit, «il eut le souci d’être au premier rang partout, d’être excellent toujours, le plus ponctuel, le plus laborieux, le plus aimable» et, devant la mort elle-même, le plus vaillant pour mériter mieux le bonheur qui ne doit pas finir.

La mémoire du jeune poète mérita bientôt d’être consacrée par des strophes, jaillies du cœur d’un ami. Ces vers seront le cadre où nous aimons à fixer, en terminant cette belle physionomie de jeune homme, ancien de Sainte-Marie :

À l’assaut, l’arme au poing, en guerrier il est mort ;
Et c’était un poète, et c’était un artiste,
Fin, délicat, songeur et mystique, un peu triste,
Comme s’il pressentait un coup haineux du sort.

Un doux rêve, discret, demi-voilé, mais fort,
Dans cet âge où nul cœur à l’amour ne résiste,
Enlaçait chastement son âme d’humaniste,
Bercé par elle ainsi qu’un bel enfant qui dort.

Il tomba transpercé du front jusqu’à la nuque,
Sa courte vie, hélas ! hâtivement caduque,
Eut pour derniers concerts les fracas du canon.

Pour le saisir la mort bondit sur sa pensée,
Broyant et dévorant en sa fleur, l’insensé,
Un esprit magnifique et peut-être un grand nom.

Poète qui craignis de n’offrir au Seigneur
Que «les fruits sans éclat qu’on ramasse par terre»
Et qui, tout pénétré d’un amour salutaire,
Étais toujours resté sans reproche et sans peur ;

Toi qui portais dans le combat ton âme pure
Ainsi qu’un talisman d force et de bonheur,
Quand le vent de la mort effleura ta figure
Et que Dieu vint frapper aux portes de ton cœur,

Tu pus répondre : Me voici, je viens, mon Maître ;
L’espérance et la joie habitaient ma maison,
Je vous donne les fruits que je n’ai pu connaître,
Je vous donne les fleurs de ma jeune maison.

 

1 - Ce jeune Prénat, l’un des fils si regretté de M. Auguste Prénat, de Saint-Étienne, était son meilleur ami. Sa mort l’avait atterré. «Pauvre ami, disait-il, que j’aimais profondément. Il y avait entre nous une chrétienne union, comme on ne saurait en rencontrer que rarement ici-bas».

 

Jules Dupin, Les asecnsions du cœur, couv     Jules Dupin, Journal, 1905-1915, couv

 

 

 

 

la mort du sous-lieutenant Dupin dans le J.M.O.

 

JMO 30e BCA, 26 juillet 1915 (1)

JMO 30e BCA, 26 juillet 1915 (2)
extrait du J.M.O. (journal des marches et opérations)
du 30e Bataillon de chasseurs alpins, à la date du 16 juillet 1915

 

 

 

 

à la mémoire de Jules Dupin

 

les élites sacrifiées (4)

 

les élites sacrifiées (1)

les élites sacrifiées (2)

les élites sacrifiées (3)
Les Fleurs d'or : revue mensuelle, dir. Maurice Rocher, octobre 1915

 

 


 

 

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22 septembre 2018

Francisque DUPRÉ

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

Francisque DUPRÉ

 

 

Francisque Dupré est né le 29 mars 1875 à Panissières (Loire). Il est mort le 13 septembre 1914 à Panissières.

Bien que son nom figure sur le monument aux morts de la commune de Panissières, il ne semble pas qu'il soit "mort pour la France". Le fichier des morts pour la France du site Mémoire des hommes ne compte aucune fiche à son nom.

Sa fiche matricule indique la date de décès, moins d'un mois après être arrivé dans son régiment, le 16 août 1914.

Francisque Dupré était notaire, et fils de notaire. En 1914, il est maire de Panissières.

 

 

acte de naissance de Francisque Dupré

 

acte naissance Dupré Francisque
acte de naissance de Francisque Dupré, né le 29 mars 1875

 

 

fiche matricule de Francisque Dupré

 

Dupré Francisque, fiche matricule (1)

Dupré Francisque, fiche matricule (2)
fiche matricule de Francisque Dupré, né le 29 mars 1875

 

 

 

recensement de 1911, commune de Panissières (Loire)

 

extrait recensement Panissières, 1911
la famille Dupré sur le recensement de 1911 à Panissières (rue de la Liberté)

 

Sur le recensement de 1911, on voit :

  • Benoît Dupré, né en 1845 à Saint-Galmier, notaire honoraire
  • son épouse : Marie Louise, née en 1854 à Saint-Étienne
  • Francisque Dupré, né à Panissières
  • son épouse : Marie, née en 1883 à Grand-Croix
  • leur enfant : Benoît Maurice, né en 1910

 

 

 

Panissières, rue de la Liberté

Francisque Dupré habitaite rue de la Liberté à Panissières.

 

Panissières, rue de la Liberté
Panissières, rue de la Liberté

 

 

Panissières, rue de la République, mairie

 En 1914, Francisque Dupré est maire de la commune de Panissières.

 

Panissières, rue de la République, mairie
Panissières, rue de la République, mairie

 

 

 

 

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21 septembre 2018

(Charles) Paul DURAND

les 146 anciens élèves de Sainte-Marie morts pour la France, 1914-1918

 

 

 

(Charles) Paul DURAND

 

 

DURAND Paul, fiche MPLF

 

  • Il s'agit en réalité de Paul (et non Charles) Durand, comme le prouve la notice qui lui est consacrée dans le Livre d'or.

Paul Durand est né le 11 juin 1897 à Lyon (5e arr.). Il est mort le 8 décembre 1915 à Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais) à l'ambulance 11/XVIII. Il avait dix-huit ans.

Il a été incorporé comme engagé volontaire au 26e régiment de Dragons le 6 septembre 1914.

Il est passé au groupe cycliste de la 1ère Division de cavalerie (ce groupe est rattaché au 26e bataillon de chasseurs à pied) le 26 novembre 1915. Il a été blessé sur le champ de bataille (l'endroit n'est pas mentionné dans les documents) et est mort dans l'ambulance (poste médical) 11/XVIII situé à l'arrière de la zone de combat.

 

 

fiche matricule de Paul Durand

 

Paul Durand, fiche matricule (1)

Paul Durand, fiche matricule (2)
fiche matricule de Paul Durand, né le 11 juin 1897

 

 

 

Sainte-Marie, Livre d'Or, 1914-1918

Paul Durand
de Lyon

Paul Durand s’engagea à dix-sept ans, et fut tué à dix-huit. Mortellement blessé, il eut autant de courage pour accepter la mort en chrétien qu’il en avait eu pour la braver. Sorti jeune de notre maison, il nous laisse pour toujours le souvenir de son âme affectueuse et franche.

Paul Durand s’était engagé au 26e Dragons, au retour d’un voyage en Angleterre. Après avoir tenu les tranchées pendant dix mois, il passa à un groupe cycliste et c’est à ce groupe qu’il fut cité de la manière la plus élogieuse pour lui.

Il s’exposait au danger avec une bravoure superbe, lorsqu’il fut frappé dans une tranchée à Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais) le 8 décembre 1915 (1). Il se rendit compte de la gravité de son état, reçut les derniers sacrements avec beaucoup de piété, fit noblement son sacrifice.

Son corps repose dans le cimetière de Beaumetz-les-Loges.

1 - Cette affirmation ne semble pas très sure. En effet, Beaumetz-les-Loges n'était pas immédiatement sur le front, il n'y avait pas de tranchées de première ligne ; celles-ci sont plus au nord-est, autour d'Arras ou un peu au sud, à Bailleulval où se trouve la 1ère division de cavalerie. Beaumetz est le lieu où était installée l'ambulance, mais Paul Durand a été blessé ailleurs.

 

 

 

de septembre 1914 à novembre 1915, Paul Durand est au 26e Dragons

 

Dijon, caserne 26e Dragons
Dijon, caserne du 26e régiment de Dragons

 

un dragon du 26e
un dragon du 26e régiment

 

soldats du 26e Dragons dans les tranchées
soldats du 26e Dragons dans les tranchées

 

 

 

Paul Durand appartenait au groupe cycliste de la 1ère Division de cavalerie

Le 26 novembre 1915, il quitte le 26e Dragons pour le 1er groupe cycliste.

 

chasseur cycliste et sa pliante
chasseur cycliste et sa bicyclette pliante "Gérard"

 

cycliste sur le front, août 1915
cycliste sur le front, août 1915

 

2e bataillon de cyclistes
soldats du 2e bataillon de cyclistes (source : site chtimiste.com)

 

Raoul Dutacq, 1er groupe cycliste, 1915
soldat du 1er groupe de chasseurs cyclistes,
26e BCP, 1ère Division de cavalerie, en 1915 (source)

 

 

 

où Paul Durand a-t-il été blessé ?

On connaît le lieu de sa mort, à l'ambulance 11/18 de Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais) mais on ignore le secteur de combat où il a été frappé.

En fonction des informations partielles tirées, d'une part de la localisation de l'ambulance et, d'autre part, du groupe cycliste auquel il appartenait, deux hypothèses peuvent être étayées.

 

Première hypothèse

Début décembre 1915, l'ambulance 11/18 est attachée à la 34e division d'infanterie. On peut donc supposer que Paul Durand relevait de l'un de ses régiments ou d'un service divsionnaire proprement dit (agent de liaison ?).

Depuis plusieurs semaines, la 34e D.I. est positionnée au nord d'Arras, entre les communes d'Anzin-Saint-Aubin, Sainte-Catherine, Saint-Nicolas et Roclincourt.

 

34e DI, nord d'Arras, sept 1915, légendé
troisième bataille d'Artois, préparation, 25 septembre 1915 (carte AFGG)

 

Est-ce là que Paul Durand a été blessé ? C'est une hypothèse probable.

Le J.M.O. (journal des marches et opérations) de la 34e D.I. fait état de bombardements sur son secteur. Par exemple le 7 décembre : «L'artillerie ennemie s'est montrée assez active (77 et 105) notamment sur le sous-secteur nord» ; et le 8 décembre : «Rafales intermittentes de l'artillerie ennemie». Paul Durand en a peut-être été la victime.

  • On lit dans ce J.M.O. le mention d'un lieu appelé «Maheas» ou «centre Maheas». Ce n'est pas une appelation géographique mais une dénomination faisant référence au colonel Maheas, du 88e R.I., tué en juin 1915 à Roclincourt.

 

JMO 34e DI, déc 1915 (1)

JMO 34e DI, déc 1915 (2)
J.M.O. de la 34e division d'infanterie, décembre 1915

 

 

Deuxième hypothèse

Paul Durand fait partie du groupe cycliste de la 1ère division de cavalerie. Or celle-ci se trouve à proximité de Beaumetz-les-Loges, à Bailleulval, zone de tranchées comme l'indique le J.M.O. de cette grande unité.

 

Diapositive1
zone occupée par la 1ère Division de cavalerie en décembre 1915, à proximité de Beaumetz-les-Loges

 

Paul Durand était-il alors affecté aux opérations de combat se déroulant dans ce secteur ? Dans ce cas, étant blessé il a été transporté à l'ambulance la plus proche, celle de Beaumetz-les-Loges.

Cette hypothèse est également envisageable, même si les indices pouvant la corroborer ne sont pas très nombreux. Parmi ceux-ci figure la mention d'un groupe cycliste dans le J.M.O. de la 1ère Division de cavalerie.

 

JMO 1ère div cavalerie, déc 1915, légendé
un groupe cycliste fait partie des éléments de la 1ère Division de cavalerie
à proximité de Beaumetz-les-Loges ; J.M.O., 18 novembre 1915

 

 

 

Paul Durand est mort à Beaumetz-les-Loges

En décembre 1915, la commune de Beaumetz-les-Loges n'est pas une zone de combat. Elle est située un peu en arrière et accueille l'ambulance 11/18.

 

Beaumetz, gare bombardée
Beaumetz-les-Loges, la gare bombardée

 

Beaumetz, rue des Loges
Beaumetz-les-Loges, carte envoyée par un soldat en 1915

 

Beaumetz, rue des Loges (2)
Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais), rue des Loges

 

 

l'ambulance 11/XVIII de Beaumetz-les-Loges

Une ambulance ne désigne pas un véhicule (sauf si c'est une ambulance automobile) mais une unité médicale chargée de soigner les blessés et de les évacuer vers l'arrière. Elle peut changer fréquemment d'emplacement.

La numérotation des ambulances relevait d'un système logique au début de la guerre mais elle a été bouleversée au cours du temps.

Ainsi l'ambulance 11/XVIII, ou 11/18, signifiait qu'elle était la 11e ambulance du XVIIIe (18e) corps d'armée. Mais, en 1915, elle semble relever, un temps, du 17e corps d'armée puisqu'elle est mentionnée dans le J.M.O. de cette grande unité.

On apprend, par exemple, que le 11 octobre 1915, elle quitte son emplacement de Bavincourt pour s'installer à Beaumetz-les-Loges, plus près d'Arras (J.M.O. du service de santé du 17e corps d'armée, 7-11 octobre 1915).

C'est là que Paul Durand, probablement mortellement touché, a succombé à ses blessures. Mais il avait été atteint dans un secteur combattant du front, peut-être devant Arras.

 

ambulance 11-18 à Beaumetz
J.M.O. du service de santé du 17e corps d'armée, 7-11 octobre 1915

 

L'ambulance 11/18 quitte le 17e corps d'armée à la date du 1er janvier 1916, suite à une réorganisation des Divisions ordonnée par le Grand Quartier général. Elle relève désormais de la 88e division d'infanterie territoriale comme nous l'apprend le J.M.O de cette unité, en date du 9 novembre 1915 : «le XVIIe corps d'armée en nous quittant nous a laissé l'ambulance XI/XVIII, de sorte que nous possédons 2 ambulances, etc...».

Mais cela n'intéressait plus Paul Durand...

 

ambulance 11-18 quitte le 17e CA, 1er janv 1916
J.M.O. du service de santé du 17e corps d'armée, 1er janvier 1916

 

Diapositive1
autour d'Arras, 11 octobre 1915 (carte AFGG)

 

 

 

 

en 1915, Paul Durand a été enterré à Beaumetz-les-Loges

Beaumetz-les-Loges se trouve au sud-ouest d'Arras. Paul Durand y a été enterré en 1915. Sa dépouille est-elle restée dans ce cimetière ? Ou bien a-t-elle été réinhumée ailleurs ? Nous n'en savons rien.

 

Beaumetz, cimetière
le cimetière de Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais)

 

cimetière de Beaumetz-les-Loges
cimetière de Beaumetz-les-Loges, avril 2013

 

Beaumetz, carte IGN 1950, légendé
Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais), carte IGN 1950

 

 

 

 

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